Exutoire de l’étang de Léon, à l’ouest du département des Landes, le courant d’Huchet se faufile à travers un paysage amazonien jusqu’à l’océan Atlantique.
Olivier Sorondo 17 octobre 2023 – Dernière MAJ : le 17 octobre 2023 à 18 h 20 min
Comme un sentiment hors du temps
Bien naïf celui qui considère les Landes comme une interminable et monotone forêt de pins. Le département regorge de petits territoires singuliers et discrets, souvent éloignés des vagues de touristes, qui contribuent à sa richesse.
Le courant d’Huchet est l’un de ceux-là, même s’il bénéficie d’une notoriété aujourd’hui bien établie. L’endroit suscite il est vrai l’admiration de ses visiteurs depuis déjà de nombreuses décennies. Ainsi, le journaliste Gilles Charles laisse parler son émotion dans le supplément littéraire du Figaro paru le 16 octobre 1921 : « Mais l’on rechercherait vainement ici les molles harmonies des paysages de la Loire et si l’on peut découvrir une harmonie profonde, elle ne manque pas d’une certaine violence. Tant il y a que l’étang de Léon est étrangement séduisant. Et si le courant d’Huchet ne peut vous émouvoir, c’est à désespérer. Imaginez un minuscule cours d’eau qui serpente entre des rives boisées, si minuscule à certains endroits que la barque la plus étroite y passe à grand-peine. Et ce ruisseau forme des criques, de petites anses où la lumière s’opalise dans l’ombre verte des feuillages, où, sur l’eau dormante, s’épanouissent les fleurs des nénuphars, les fougères royales et les hibiscus nuancés. »
La découverte du lieu reviendrait au poète italien Gabriele d’Annunzio en 1908, mais il est fort probable que les habitants de cette partie du littoral le connaissaient depuis fort longtemps. Le Pays de Born et du Marensin laisse d’ailleurs voir d’autres courants, ou petits fleuves côtiers. Tous jouent le rôle d’exutoire des étangs et permettent de drainer les sols sableux. Ils se jettent dans l’océan Atlantique en franchissant les dunes par une embouchure, ce qui les soumet d’ailleurs au mouvement des marées dans leur partie aval.
Pour sa part, l’embouchure du courant d’Huchet n’a jamais été stabilisée par des travaux d’endiguement. Force est de constater que parmi les fleuves côtiers de cette partie des Landes, il s’impose comme le plus somptueux et remarquable. La richesse de son environnement lui vaut d’être classé dès 1934 au titre des monuments naturels et des sites à caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque.
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La beauté des Landes dans le reflet de l’eau
Le courant d’Huchet est l’un de ceux-là, même s’il bénéficie d’une notoriété aujourd’hui bien établie. L’endroit suscite il est vrai l’admiration de ses visiteurs depuis déjà de nombreuses décennies. Ainsi, le journaliste Gilles Charles laisse parler son émotion dans le supplément littéraire du Figaro paru le 16 octobre 1921 : « Mais l’on rechercherait vainement ici les molles harmonies des paysages de la Loire et si l’on peut découvrir une harmonie profonde, elle ne manque pas d’une certaine violence. Tant il y a que l’étang de Léon est étrangement séduisant. Et si le courant d’Huchet ne peut vous émouvoir, c’est à désespérer. Imaginez un minuscule cours d’eau qui serpente entre des rives boisées, si minuscule à certains endroits que la barque la plus étroite y passe à grand-peine. Et ce ruisseau forme des criques, de petites anses où la lumière s’opalise dans l’ombre verte des feuillages, où, sur l’eau dormante, s’épanouissent les fleurs des nénuphars, les fougères royales et les hibiscus nuancés. »
La découverte du lieu reviendrait au poète italien Gabriele d’Annunzio en 1908, mais il est fort probable que les habitants de cette partie du littoral le connaissaient depuis fort longtemps. Le Pays de Born et du Marensin laisse d’ailleurs voir d’autres courants, ou petits fleuves côtiers. Tous jouent le rôle d’exutoire des étangs et permettent de drainer les sols sableux. Ils se jettent dans l’océan Atlantique en franchissant les dunes par une embouchure, ce qui les soumet d’ailleurs au mouvement des marées dans leur partie aval.
Pour sa part, l’embouchure du courant d’Huchet n’a jamais été stabilisée par des travaux d’endiguement. Force est de constater que parmi les fleuves côtiers de cette partie des Landes, il s’impose comme le plus somptueux et remarquable. La richesse de son environnement lui vaut d’être classé dès 1934 au titre des monuments naturels et des sites à caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque.
Loin des tomates insipides qui peuplent les étals des supermarchés, la Marmande revendique depuis plus d’un siècle ses arômes prononcés, issus d’un travail passionné et artisanal.
Olivier Sorondo 18 août 2022 – Dernière MAJ : le 20 septembre 2022 à 11 h 06 min
Belle, charnue, juteuse et gourmande, c’est la Marmande !
Au tout début, une histoire d’amour
C’est une légende charmante qui entoure l’apparition de la tomate de Marmande.
Il était une fois une très belle jeune femme, Ferline Giraudeau, fille d’un bourgeois de Marmande. Au grand désespoir de son père, veuf et vieillissant, aucun des prétendants ne trouvait grâce aux yeux de la belle demoiselle. Encore plus pauvre et plus timide que ses rivaux, Peyot Bory renonça à déclarer son amour et décida de s’embarquer pour les Amériques depuis le port de Bordeaux.
Après quatre ans d’aventures et de découvertes, Peyot revint à Marmande, riche d’un sac de graines. Il les sema dans le jardin paternel et, dès les premiers jours de l’été, obtint de superbes fruits rouges, ronds et lisses. N’ayant pas oublié sa chère Ferline, il prit l’habitude de lui déposer chaque matin une corbeille bien garnie au pied de sa fenêtre.
Intriguée, celle-ci finit par le surprendre :
– Dis-moi, ami, comment s’appelle donc ce fruit délicieux que tu m’apportes chaque jour ?
– Lorsque j’étais aux Amériques, les Indiens l’appelaient la « tomate », mais moi, je l’appelais « Ferline » en souvenir de toi, tant elle était belle !
– Eh bien, lui dit-elle en se jetant dans ses bras, à partir d’aujourd’hui, nous l’appellerons « La pomme d’amour ».
Ce titre de pomme d’amour accompagna d’ailleurs de nombreuses années la tomate de Marmande.
Originaire des Andes d’Amérique et introduite en Europe au 16e siècle, la tomate fait son apparition dans le Marmandais en 1863. Sa culture permet de compenser les lourdes pertes engendrées par l’épidémie de phylloxéra, qui ravage les vignes.
Quelques décennies plus tard, les producteurs parviennent à croiser les variétés pondorosa et mikado pour donner naissance à la future tomate de Marmande. Fruit à maturité hâtive (entre 55 et 65 jours), la tomate révèle des qualités gustatives supérieures et se prête fort bien au transport. Au 19e siècle, d’importantes quantités sont exportées en Angleterre.
Le succès commercial oblige à étendre la zone de production et agrandir les exploitations. L’apparition des conserveries marque le début du cycle de transformation de la tomate. Les établissements sont construits au bord de la Garonne, afin de faciliter le transport des produits et profiter de l’eau pour laver les fruits.
La qualité comme premier argument
Au cœur du Lot-et-Garonne, la tomate de Marmande bénéficie d’un climat océanique favorable, avec des températures douces en hiver, des étés chauds et des pluies abondantes au printemps. La variété Marmande se compose de trois tomates bien distinctes :
– La tomate côtelée : avec une couleur qui varie du brun foncé au jaune orangé en passant par le rouge, elle se déguste en salade et même farcie.
– La tomate cornue : on la repère tout de suite grâce à sa forme de piment. Contrairement à ses sœurs, la cornue est avare en jus, ce qui permet de la passer au barbecue ou de l’ajouter à un sandwich, avec du fromage et du jambon.
– La tomate cœur : de forme allongée, impossible de l’apprécier autrement qu’en salade grâce à sa texture fondante, avec un filet d’huile d’olive ou une pointe de sel.
Sa culture répond à un cahier des charges méticuleux. Les meilleures variétés sont choisies, à même de développer une saveur prononcée, similaire à celle ayant contribué à la réputation du fruit. Bien sûr, pas de hors-sol en terres marmandaises. Le mode de culture se veut traditionnel, en pleine terre et sous abri. La plantation s’effectue à la main et l’irrigation est assurée grâce au système de goutte-à-goutte. L’apport de matières organiques et de minéraux permet une fertilisation traditionnelle. La pollinisation dépend de la mise en place de ruches à bourdons et le désherbage reste manuel, sans aucun produit chimique. La main de l’homme reste aussi le seul outil lors de la récolte et du conditionnement.
Encore un peu de patience – Crédit photo : Quisnovus – Flickr
D’un poids variant entre 200 et 400 grammes, la tomate de Marmande, très parfumée et sucrée, suscite le plaisir du goût retrouvé. Sa distribution, entre mai et octobre, se limite essentiellement aux magasins et marchés de la région, du fait aussi de sa faible production.
En effet, seule une quinzaine de producteurs se consacre aujourd’hui à la culture du fruit de bouche. Sur une surface de 14 hectares, la production ne dépasse pas les 1 500 tonnes. « Si l’on ne fait rien, dans quinze ans, ce mode de production aura disparu car, progressivement, les producteurs arrêtent, confrontés à une rentabilité qui n’est pas au rendez-vous » constate Gilles Bertrandias, le directeur général de Paysans de Rougeline, cité par le site Business Les Échos.
Les tomates destinées à la transformation (jus, sauce, tourin, ketchup) donnent lieu à une activité plus soutenue. Près d’une centaine de producteurs s’affaire, sur une zone de culture dépassant les 500 hectares. La production annuelle s’établit à environ 35 000 tonnes, dont une partie en bio. Cette étape de la transformation permet une diffusion commerciale beaucoup plus large de la pomme d’amour.
Une marque en attendant l’IGP
Soucieux d’assurer une meilleure image de son produit roi, l’association des fruits et légumes du Lot-et-Garonne (AIFLG) a lancé en 2020 la marque collective « Tomate de Marmande ». Elle est depuis commercialisée par les supermarchés et les grossistes.
L’enjeu consiste avant tout à « valoriser le savoir-faire et le terroir », selon Danielle Marcon, la présidente de l’AIFLG. La tomate de Marmande doit en effet faire face à la concurrence redoutable des produits exportés d’Espagne, d’Italie et du Maroc.
Pour Gilles Bertrandias, « l’objectif, c’est qu’il n’y ait plus aucun producteur qui arrête son activité, mais aussi que de nouveaux producteurs lancent la leur. Si on ne faisait rien, cette production locale risquait de disparaître ! »
Adhérer à la marque « Tomate de Marmande » suppose de respecter le cahier des charges établi par l’AIFLG. « Il faut faire partie d’une zone géographique qui, en gros, s’étend sur la vallée fluviale de la Garonne, du Lot, de la Dordogne. Il faut aussi respecter des critères de variétés, de traçabilité, de respect de l’environnement. En matière de variétés, il faut par exemple cultiver ses tomates en pleine terre et non en hors-sol. Autrement dit, pour le consommateur, c’est une promesse de qualité et surtout de production locale » explique Frédéric Marchezin, producteur implanté à Puch d’Agenais et cité par le site Actu.fr.
La création de la marque, reconnue par l’INPI, constitue la première démarche visant à décrocher l’IGP (Indication Géographique Protégée), qui s’attache aux produits dont la qualité est liée au lieu de production, de transformation et d’élaboration. À ce titre, le cahier des charges a été rédigé au premier semestre 2022, mais le combat sera long et difficile. L’instruction du dossier « peut prendre jusqu’à 15 ans » reconnaît Danièle Marçon.
Il est également question de lancer le chantier du Label Rouge, véritable Graal des producteurs locaux. Félix Pizon, le directeur de l’AIFLG, indique à La Dépêche que le processus a déjà été initié : « Nous voulons recentrer la production autour du bassin du Marmandais (…) Les recherches variétales vont dans le sens d’une amélioration gustative, plus de sucre parfois, ou encore une chair différente. Pour la tomate transformée, il s’agit surtout de travailler la résistance aux maladies. »
Les espoirs apparaissent donc forts au sein de la filière, qui concerne un millier d’emplois directs. Les producteurs restent persuadés que la qualité de la Marmande contribuera à une meilleure reconnaissance et à une plus forte rentabilité, essentielle à la pérennité de l’activité.
Ils peuvent en tout cas compter sur la confrérie des chevaliers de la tomate de Marmande. Ambassadrice zélée, elle assure tout au long de l’année la promotion et la valorisation de la pomme d’amour, notamment lors de la fête de la tomate, organisée chaque été dans la cité gasconne.
Mais quelle est donc l’origine du pruneau d’Agen ?
Réputé pour son goût, ses fibres et vitamines, le pruneau d’Agen est né à l’abbaye de Clairac au 12e siècle. Mais le pruneau était déjà consommé depuis des siècles.
Olivier Sorondo – 31 mars 2022 – Dernière MAJ : le 1 juin 2022 à 14 h 08 min
Crédit photo : Bureau national Interprofessionnel du Pruneau
Une très longue histoire
Le pruneau doit certainement son apparition à la route de la soie, reliant la Chine à la Rome antique. Elle a en effet permis au prunier de s’établir sur le pourtour méditerranéen et de s’y développer.
La technique consistant à transformer la prune en pruneau ne revient pas aux habitant du pays d’Agen. Dès l’Antiquité, on procède en effet au séchage du fruit en l’exposant au soleil. Les médecins grecs, romains et arabes recommandent ses vertus diététiques et nutritionnelles.
Ce n’est pas non plus à Agen que les premiers pruniers sont plantés, mais dans la province romaine dite de « La Narbonnaise ». Les Romains introduisent en Gaule plusieurs variétés de prunes, dont la prune Maurine (ou de Saint-Antonin), qui se transforme en petit pruneau très noire.
Il faut attendre le 12e siècle pour que le pruneau d’Agen fasse enfin son apparition. Défaits lors de leur 3e croisade, les Templiers rapportent en France des plants de pruniers de Damas. Les moines-soldats font à ce titre l’objet de nombreuses critiques, beaucoup estimant qu’ils se sont rendus en Orient « pour des prunes », c’est-à-dire pour rien. L’expression est restée !
Les moines bénédictins de l’abbaye de Clairac (à quelques dizaines de kilomètres d’Agen) tirent néanmoins avantage de la situation et plantent quelques pruniers de Damas. Ils ont surtout la bonne idée de greffer les pruniers locaux avec ceux ramenés de Syrie, donnant ainsi naissance à une nouvelle variété de fruit, la prune d’Ente.
La particularité du pruneau d’Agen
Dotée d’une robe bleu mauve, la prune d’Ente s’adapte bien au climat du Sud-Ouest.
Le séchage s’organise en deux étapes. La première consiste à installer les prunes sur un tapis de paille pour profiter du soleil. Les religieux font ensuite preuve d’innovation en répartissant les fruits sur des claies en bois de peuplier qu’ils introduisent dans un four à pain, chauffé à douce chaleur.
L’opération permet d’obtenir un pruneau de belle taille, parfaitement séché, aux saveurs fines et plaisantes. C’est le début d’une grande aventure commerciale.
Récoltés dans la région de Villeneuve-sur-Lot, les pruneaux sont transportés en gabarre du port d’Agen jusqu’à celui de Bordeaux avant d’être chargés à bord de voiliers commerciaux. Les fruits étant enregistrés d’après le nom du port d’embarquement d’origine, on les identifie sous la dénomination de « pruneaux d’Agen », marquée sur chaque baril.
Dès le 17e siècle, les marins apprécient particulièrement le produit. Facile à conserver, goûteux, il représente un remède efficace contre le scorbut.
Sa commercialisation s’internationalise. On apprécie le pruneau d’Agen en Angleterre, aux Pays-Bas, en Afrique du Sud et dans le Nouveau Monde.
Un siècle plus tard, la production de prunes d’Ente se diffuse plus largement, sur les terres argilocalcaires entre la Garonne et le Lot. En 1894, on ne compte pas moins de cinq millions de pruniers dans le Lot-et-Garonne.
Séchages des prunes d’Ente au début du 20e siècle – Crédit photo : BIP
La priorité est de répondre à la forte demande de nombreux pays, qui découvrent la petite pépite noire grâce à la Royale et à la marine marchande française.
Les techniques de séchage évoluent. En 1955, les producteurs ont recours à la technique du tunnel, d’abord chauffé au bois puis au fioul, avant d’adopter le gaz propane.
Aujourd’hui, 1140 exploitations s’impliquent dans la production du pruneau d’Agen, répartie sur les 12735 hectares de la zone IGP. Avec plus de 40 000 tonnes produites chaque année, ils contribuent à pérenniser un fruit réputé et un savoir-faire séculaire.
À quelques kilomètres au sud de Condom, dans le Gers, le village de Saint-Puy profite d’une vue exceptionnelle. Juché sur une colline, il accueille le château de Monluc, dont la première pièce fut posée il y a près de dix siècles. L’édifice a bravement traversé les péripéties de l’Histoire. Il subit pourtant les assauts du comte d’Armagnac en 1272, qui l’assiégea et le brûla en partie après le refus du Comte de Gaure de le lui céder. Fort heureusement, le château fut reconstruit sous l’impulsion du roi de France, Philippe le Hardi.
En 1425, le roi Charles VII fait cadeau du comté de Gaure à son cousin Charles d’Albret. Ce dernier offre le château en 1470 à son maître d’hôtel, Pierre de Lasseran-Massencôme, Seigneur de Monluc, rattaché à la Maison de Montesquiou.
C’est dans cette vaste demeure que naît Blaise de Monluc en 1500. L’homme connaît une carrière militaire brillante grâce à sa fougue et à son entière dévotion aux rois de France. Il reçoit d’ailleurs le titre de maréchal de France en 1574, au crépuscule de sa vie.
Surtout, Blaise de Monluc a ramené des guerres d’Italie une longue et fine épée, la rapière, particulièrement appréciée des Gascons. Légère et tranchante, elle se révèle redoutable au combat, à la différence des lourdes épées du Moyen-Âge. Il était d’usage de « pousser la rapière » sur l’ennemi.
Le château de Monluc, à Saint-Puy – Crédit photo: Google Street View
Le seigneur de Monluc profite aussi sur ses terres de la culture des vignes, introduite par les Romains en Gascogne. Au 15e siècle, les vignerons commencent à distiller une partie de leur production et donnent naissance à l’armagnac.
Ces éléments historiques ne laissent pas de marbre René Lassus, l’héritier du château de Monluc. Issu d’une famille de vignerons, il entreprend de champagniser les vins de son vignoble, en considérant qu’ils pourraient joliment se marier avec un fond d’armagnac.
Sa démarche s’inspire d’une recette familiale, qu’il entend améliorer. Il a ainsi la bonne idée d’aromatiser la liqueur d’armagnac à l’orange amère, dont toutes les saveurs se révèlent dès lors qu’on y ajoute un vin gascon brut et mousseux.
Une création et une fierté gasconnes
L’année 1961 voit donc naître un nouvel apéritif qui revendique son origine et son terroir. René Lassus le surnomme Pousse l’Amour et limite sa diffusion auprès de ses amis, dont ceux de la Compagnie des Mousquetaires d’Armagnac.
Néanmoins, le divin breuvage suscite un tel enthousiasme qu’il envisage de le commercialiser. Il réfléchit à un nouveau nom et se tourne presque naturellement vers l’histoire du seigneur de Monluc, redouté en son temps grâce à son maniement de la rapière. C’est ainsi qu’il choisit le terme de Pousse Rapière avant de partir à l’assaut des clients.
Son concept, consistant à marier la liqueur d’armagnac au vin brut produit selon la méthode traditionnelle champenoise, fait mouche. « Son succès tient au fait que les deux composants sont élaborés, dès l’origine, dans le souci de réaliser un mélange équilibré. Le vin et la liqueur sont faits l’un pour l’autre, à partir du même terroir, du même vignoble et leur mariage est le plus naturel et heureux qui soit » expliquait Noël Lassus, le fils de René, à Sud-Ouest en 2011.
La liqueur d’Armagnac est ainsi préparée avec le jus issu de la macération des zestes d’orange amère et une pointe de sirop de sucre. L’orange apporte ce goût inimitable au Pousse Rapière.
Il convient également d’utiliser, si l’on souhaite pleinement profiter de l’apéritif gascon, le vin sauvage produit par le château de Monluc. Issu du même vignoble, il se compose des mêmes cépages blancs que celui de l’armagnac, le gros manseng et l’ugni-blanc. La première cuvée permet la fermentation du raisin. La seconde fermentation intervient lors de l’assemblage final, au cours duquel sont ajoutées de la liqueur de sucre et des levures. L’opération permet de donner naissance aux bulles, après élimination des levures mortes et leur remplacement par une « liqueur de tirage ».
Dans un souci de qualité, l’assemblage se nourrit de vins produits au cours de l’année, mais aussi de ceux des deux années précédentes
Il en résulte un vin mousseux brut, à la saveur vive et au léger goût de citron.
Le Pousse Rapière fête ses 50 ans
Déjà un demi-siècle d’existence pour l’apéritif gascon, quelquefois imité, mais jamais égalé. Sa dégustation obéit à une règle simple : 1 volume de liqueur de Pousse Rapière pour 6 volumes de vin sauvage, sorti du réfrigérateur. On peut y ajouter un quart de rondelle d’orange.
En l’absence de vin sauvage, un autre vin mousseux peut être utilisé, à la condition qu’il soit brut. Un vin demi-sec ou doux ne conviendrait pas, du fait que la liqueur d’armagnac est déjà sucrée.
Malgré ses indéniables qualités gustatives, le Pousse Rapière peine à rencontrer un plus large public, qu’il mérite pourtant. Le précieux nectar reste surtout distribué dans le Sud-Ouest du pays. Le château Monluc écoule ainsi 150 000 bouteilles chaque année.
Le Pousse Rapière et son vin sauvage avant leur relooking.
Si la vente en ligne peut contribuer à améliorer les ventes, les propriétaires du domaine consentent des efforts en matière de marketing et de promotion commerciale. Le château Monluc a ainsi rejoint le Club des marques en 2018, qui regroupe d’autres maisons d’armagnac, en vue de développer son activité à l’export.
Le design a également été entièrement revu, donnant naissance à une bouteille en verre noire, sur laquelle se détache une étiquette relookée.
Autre nouveauté, le Pousse Rapière se décline désormais selon trois degrés d’alcool différents : 20, 24 et 36 degrés, signalés par une couleur différente de l’étiquette.
Enfin, la liqueur orangée est aujourd’hui commercialisée sous deux formats de bouteille (70 et 35 cl) afin de mieux répondre aux attentes des consommateurs.
Le produit ne change pas, heureuse conclusion d’une recette familiale toujours gardée secrète. Tout comme le Floc de Gascogne, le Pousse Rapière offre une alternative singulière lorsque sonne l’heure de l’apéritif. Il promet un plaisir sincère de dégustation, et, surtout, toute l’authenticité d’un pays dédié à l’art du bien vivre.
C’est dans l’atelier de sa biscuiterie de la rue Bergeret, quartier des Capucins, que Raymond Boulesque conçoit en 1938 une poudre avant-gardiste. Sa formulation permet en effet de remplacer 30 % de sucre, cher à l’époque, par des farines de céréales, essentiellement du blé.
« Au départ, c’était de la poudre à épaissir avec du lait pour en faire de la bouillie pour enfants. Puis, les femmes ont utilisé ce produit pas cher, goûtu et nourrissant pour en faire des desserts pour toute la famille », précise Carole Boniface, responsable des boutiques Jock, au journal Sud-Ouest (04/08/21).
D’abord commercialisé en pharmacie, puis dans les épiceries de la ville, le produit rencontre un vrai succès. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les denrées restent rares et onéreuses. La crème Jock s’invite presque naturellement parmi les desserts appréciés des Bordelais.
En 1946, Raymond Boulesque imagine un petit-déjeuner chocolaté qu’il intitule Mars. Hélas, il oublie déposer le nom et, surtout, ignore qu’une barre au chocolat homonyme existe déjà au Royaume-Uni depuis 1932.
Malgré ce revers, l’entreprise poursuit sa croissance et s’installe en 1955 dans une usine flambant neuve rue de Bethmann. Jock continue d’innover en matière de poudres déshydratées, notamment celle permettant de préparer la crème Tradition au chocolat, toujours en vente aujourd’hui.
En 1999, l’entreprise déménage de l’autre côté de la Garonne, quai de Brazza. Dirigée par Jean-Philippe Ballanger, descendant de Raymond Boulesque, elle continue de miser sur la diversification en profitant de l’attachement de ses clients, fidèles depuis des générations.
Des desserts faciles, rapides et goûteux
Si la crème vanillée originale continue d’être commercialisée, Jock a su étendre sa gamme de produits pour coller au plus près des attentes des consommateurs. Depuis 2006, elle propose sa pâte à gâteau prête à cuire.
« Qu’on le veuille ou non, aujourd’hui, trouver les 3 minutes de touillage en casserole de la recette qui garantissent la réussite de la crème Jock, ce n’est pas si évident que cela. Nous mettrons le temps qu’il faut pour parvenir à proposer la solution qui facilite tout » déclare ainsi Jean-Philippe Ballanger à Objectif Aquitaine (23/09/2016).
De fait, les produits estampillés Jock invitent à une dégustation rapide. Baba au rhum pur beurre, moelleux au chocolat, pain d’épices au sucre complet de canne et miel français, fondant caramel… Ces recettes n’appellent aucun ingrédient supplémentaire. Il suffit de verser la préparation dans un moule beurré et d’enfourner.
Crédit photo: Maison Jock
D’autres produits nécessitent en revanche l’ajout de quelques ingrédients de base (œufs, beurre) avant de révéler toute leur saveur. C’est le cas du gâteau aux noisettes du Lot-et-Garonne ou encore du gâteau aux amandes de Méditerranée.
Ces produits contribuent certes à l’identification de la marque Jock, mais ne représentent pourtant qu’une faible part du chiffre d’affaires. L’entreprise consacre en effet une large part de son activité à la production de levure et de sucre vanillé, vendus en marques distributeurs.
Pour autant, il n’est pas envisagé une seconde d’abandonner les produits emblématiques de la maison, qui jouissent d’un réel capital sympathie auprès des consommateurs. « Avec Jock et lait en toute saison, régal et santé dans votre maison » proclamait la première publicité dans les années 1940. Un message qui semble toujours faire mouche aujourd’hui, en pleine période de pandémie.
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Lancée par le Conseil départemental et la Chambre d’agriculture des Landes en 2001, l’association Qualité landes mène une mission plutôt agréable : assurer la promotion des produits agricoles du département, particulièrement réputé en matière de gastronomie.
Huit produits labellisés motivent la communication de l’association : le Floc de Gascogne, l’armagnac, l’asperge des sables des Landes, la volaille fermière des Landes, le canard fermier des Landes, le bœuf de Chalosse, le kiwi de l’Adour et les vins de Tursan. Tous sont dotés d’une reconnaissance officielle, qu’il s’agisse du Label Rouge, de l’IGP ou de l’AOC.
C’est l’occasion rêvée de proposer une multitude de recettes, déclinées sous la forme de fiches pratiques ou de vidéos explicatives. Comment résister à un millefeuille de bœuf de Chalosse à la mangue, à des brochettes de magret de canard fermier au poivre, aux ballotines d’asperge des sables ou à une mousse au kiwi de l’Adour ?
Le site se charge également d’apporter moult informations sur les produits locaux, à l’instar de l’AOP Tursan, qui implique 70 vignerons sur une surface de 400 hectares répartis auprès d’une quarantaine de communes.
Le pari semble en tout cas gagné. La page Facebook de l’association attire plus de 180 000 abonnés, charmés par la variété des recettes que permettent ces délicieux produits landais.
À la découverte du (délicieux) dindon de Varaignes
Et pourquoi ne pas se détourner, le temps d’un repas, de notre traditionnel poulet, canard et autre volaille pour faire honneur au dindon ? Ça tombe bien, à Varaignes, on privilégie un produit d’excellence.
Olivier Sorondo 9 février 2021 – Dernière MAJ : le 24 février 2021 à 18 h 59 min
La foire au dindon de Varaignes bat son plein – Crédit photo : CPIE Périgord-Limousin
La renaissance d’un élevage traditionnel
Originaire d’Amérique, le dindon fut introduit en Espagne au début du XVIe siècle, avant de s’étendre en France et dans le reste de l’Europe.
Il est vrai que l’on imagine plus facilement le dindon occuper les grandes tablées des seigneurs, au même titre que le cygne, le paon ou la cigogne. De fait, la consommation du gallinacé s’est essoufflée au cours des siècles, au profit de la femelle, la dinde, à la taille plus modeste.
À Varaignes, en Dordogne, le dindon appartient à l’histoire du village depuis des siècles. Sa foire gourmande, organisée chaque année le 11 novembre, daterait de l’époque du bon roi Henri IV.
Pourtant, l’élevage traditionnel a presque disparu après le départ à la retraite des petits producteurs. C’était sans compter sur la motivation de quatre éleveurs qui décident de redonner ses lettres de noblesse à l’imposant volatile, fierté locale. Leur initiative est d’ailleurs soutenue par la Chambre d’Agriculture de la Dordogne.
En 2007, ils créent l’association de producteurs de dindons de Varaignes et se partagent l’élevage, en parallèle de leur activité agricole habituelle.
L’un d’eux, Patrice Gourinchas, producteur laitier, se réjouit de l’initiative : « Cette production s’inscrit dans la tradition fermière. Elle n’est pas trop gourmande en temps et c’est plutôt sympa. Les principales contraintes sont d’ordre sanitaire. Il faut être vigilant surtout lorsqu’ils sont jeunes. Les dindons arrivent sur ma ferme, à l’âge de sept semaines et ils sont abattus entre 8 et 9 mois » explique-t-il à Claude-Hélène Yvard, du site Aqui ! (09/02/2013).
Le plus grand soin est apporté à l’élevage. Ainsi, René Lachaize, autre éleveur, n’hésite pas à aller chercher l’eau de la rivière pour ses précieux gallinacés, considérant celle de la concession « trop javellisée ». Les dindons, élevés en plein air, se nourrissent de céréales produites sur place jusqu’à atteindre un poids respectable, entre 10 et 14 kg.
Une bonne et très grosse volaille
Car c’est peut-être l’imposant format du dindon qui empêche sa commercialisation à plus grande échelle, sauf à la période des fêtes de Noël, propice aux retrouvailles familiales.
Si un poulet contente largement quatre personnes, le dindon peut quant à lui satisfaire une douzaine de gourmets. Au moins.
Ce modeste succès commercial est regrettable, car la chair blanche et délicate du dindon jouit d’une solide réputation gustative.
Fort heureusement, les producteurs proposent toute une gamme de produits transformés avec l’aide du lycée agricole de Coulounieix-Chamiers. L’établissement met à disposition son laboratoire pour élaborer différentes recettes, comme celles de la rillette de dindon, du civet ou de la galantine au foie gras.
La volaille peut aussi être vendue sous forme de rôtis ou d’escalope, même si son périmètre de distribution reste assez limité. Ceux qui se sentent d’appétit devront fréquenter les marchés de producteurs en Dordogne, la boutique des éleveurs à Varaignes ou encore les coopératives de produits régionaux (Charente Coop et la Périgourdine).
Mais point de frustration non plus. L’imposant gallinacé fait l’objet d’une foire annuelle, organisée chaque année à la date du 11 novembre. L’occasion, pour une dizaine de milliers de visiteurs, de rendre hommage et de déguster le célébrissime dindon de Varaignes, dont la statue prône sur la place du village.
La foire de Varaignes, une institution gourmande
La foire daterait de l’époque d’Henri IV. À l’instar de la foire de la Latière, organisée depuis le Moyen-Âge à Saint-Aulaye, on peut dire que la Dordogne sait préserver ses traditions avec un certain brio.
Le 11 novembre, jour de la Saint-Martin, le dindon est donc à la fête, à tous les sens du terme. Impossible de louper le défilé des magnifiques animaux au plumage noir, rois du village, qui ignorent probablement le sort qui leur est réservé quelques heures plus tard, pour le banquet.
Impossible non plus de ne pas assister au concours du meilleur glouglou, toujours impressionnant même si une certaine hilarité s’empare du public.
Le clou de la journée, c’est bien sûr l’impressionnant banquet, qui réunit des centaines de convives (réservation obligatoire). On y sert la star locale, rôtie à souhait, mais aussi du pot-au-feu limousin.
La foire est également l’occasion de profiter de la présence de 130 exposants, de s’imprégner de l’ambiance festive, d’acheter (enfin) un dindon prêt à cuire, que l’on consomme généralement de janvier à mars et de novembre à décembre.
Les bienfaits de la cuisine à la graisse d’oie et de canard
Souvent utilisée dans la cuisine du Sud-Ouest, la graisse de canard et d’oie contribuerait à prévenir les maladies coronariennes. Ce n’est pas sa seule vertu.
Dr A.B., nutritionniste 5 janvier 2021 – Dernière MAJ : le 5 janvier 2021 à 18 h 48 min
Et en plus, c’est bon pour la santé – Crédit photo: Matt Ryall – CC BY 2.0
Les premières études
Dès les années 60, le Pr Serge Renaud se consacre à l’étude et à la prévention de la maladie coronarienne. En 1978, il découvre l’importance de certains acides gras insaturés pour la prévention des maladies cardio-vasculaires, c’est le début de la voie du « Paradoxe Français ». C’est pourquoi le projet MONICA a été lancé en 1987 par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) dans 41 centres répartis dans 21 pays, dont 3 en France (Lille, Strasbourg, Toulouse).
Ainsi, il a été démontré que les habitants du Sud-Ouest, grands consommateurs de cuisine à la graisse d’oie et de canard, ont une des plus faibles mortalités coronariennes et une meilleure espérance de vie.
Paradoxe
Contrairement aux idées reçues, la vertu essentielle de notre alimentation, dont on s’est rendu compte récemment, est sa relative innocuité et sa bonne qualité.
Ce n’est pas le moindre des paradoxes de la cuisine française. De nombreuses études comparatives réalisées à travers le monde démontrent que notre mode d’alimentation n’est finalement pas aussi nocif qu’on a voulu le croire. Plusieurs observations ont conduit les nutritionnistes à réviser leur jugement.
Tout d’abord, le nombre de décès par maladies cardio-vasculaires est nettement inférieur en France que dans les pays anglo-saxons. Pourtant, une analyse quantitative de la nourriture montre que la quantité de corps gras est sensiblement la même. On peut aussi montrer que pour la même quantité de nourriture, un Anglo-Saxon grossit, mais non un Français.
Qualités
La qualité de la cuisine française pourrait s’expliquer par la répartition entre les graisses, les sucres et les protéines. Ainsi, le fait de manger systématiquement du fromage à la fin du repas aurait un rôle bénéfique, tout comme la consommation (modérée !!!) de vin.
Mais la cuisine française connaît des différences régionales : les régions du Nord font plutôt de la cuisine au beurre ou à l’aide de graisses animales, tandis que celle du Sud-Ouest utilise davantage de graisse d’oie et de canard.
Pour la petite fringale de 10 heures – Crédit photo: Cyclonebill – Flickr
Après avoir étudié pendant de longues années le comportement alimentaire des ménages et leur santé, il est acquis que le modèle du Sud-Ouest est bien préférable. Sa gastronomie à base de foie gras et de confits serait bénéfique. Les produits d’oie et de canard ont en effet une teneur élevée d’acides gras poly-insaturés et d’acides oléiques, protecteurs de l’organisme, à l’inverse des graisses de porc et d’animaux de boucherie, très riches en acides saturés.
À table !
Il semble donc que nous puissions revenir à plus de fierté à l’égard des habitudes alimentaires du Sud-Ouest, car elles ne seraient pas si désastreuses, constituant même un modèle qui n’aurait pas encore, à ce jour, délivré tous ses secrets. La graisse d’oie et de canard présente des vertus longtemps insoupçonnées, qui la rend aussi bonne pour la santé que l’huile d’olive.
La longévité et la bonne humeur des Gascons en sont le vivant témoignage !
Quatrième volet de notre série consacrée aux spécialités apéritives conçues et fabriquées dans le Sud-Ouest. Après la Dordogne, les Landes et le Pays basque, c’est la Gironde qui nous ouvre son buffet.
Olivier Sorondo 28 novembre 2020 – Dernière MAJ : le 1 avril 2021 à 14 h 58 min
Crédit photo : Maison Lillet – Facebook
NB : Cet article n’est pas un publirédactionnel. Aucune rétribution n’accompagne la citation des produits ou la publication des liens hypertextes, précisés à seul titre informatif.
Il va sans dire que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé. Il convient donc de découvrir ces apéritifs avec la modération qui s’impose.
Lillet superstar
C’est dans la charmante commune de Podensac, au Sud-Est de Bordeaux, qu’est née la Maison Lillet en 1872. Les frères Lillet, liquoristes et négociants, profitent du foisonnement du port de Bordeaux pour accéder à des multiples épices, écorces et fruits en provenance des Antilles.
En 1887, ils donnent naissance au Lillet blanc, assemblage de vins du Sauternais, de liqueurs de fruits exotiques et de quinquina (la recette originale reste secrète !). Vieilli plusieurs mois en fût de chêne, le breuvage laisse éclater en bouche des arômes d’orange confite, de miel et de résine de pin.
Le produit rencontre un succès local rapide puis part à la conquête du pays et de l’Europe au terme de la Première Guerre mondiale.
Au début des années 60, l’apéritif bordelais conquiert même les États-Unis. C’est d’ailleurs à l’attention des consommateurs américains que Pierre Lillet conçoit le Lillet rouge en 1962. La boisson se veut plus tanique en bouche, sur la base de fruits rouges bien mûrs et de parfums prononcés d’orange fraîche.
Le Lillet rosé, mélange de Lillet blanc et rouge, complète la gamme, offrant une légère acidité en bouche.
Même si l’équipe en charge de sa production ne dépasse pas les huit artisans, défenseurs d’un savoir-faire certain, le Lillet s’écoule à près de 7 millions de bouteilles dans le monde entier. On le déguste frais, entre 6 et 8°C, sur un nid de glaçons avec une rondelle d’orange ou de citron vert. Le breuvage se prête aussi parfaitement aux cocktails.
D’autres spécialités quand même
Également conçue à base de vin, la Garluche ne suit pas la même ambition commerciale que le Lillet, ce qui ne l’empêche pas de revendiquer crânement sa place parmi les apéritifs girondins. Léger, peu sucré, le produit résulte d’un assemblage de vin blanc de Bordeaux, de sucre de canne, de rhum de Martinique, de caramel et de zestes d’orange amère.
Inventée par le grand-père Bauer au début du 20e siècle, la recette finit par être transmise à Philippe, le petit-fils, qui décide de lancer la commercialisation du produit en 1990.
Après avoir trouvé le nom, tiré d’une pierre de construction landaise, de même couleur rouille que son apéritif, Phillipe installe son atelier de production à Blanquefort. Aujourd’hui, 20 000 bouteilles s’écoulent chaque année, principalement dans le Sud-Ouest, mais aussi grâce à la vente en ligne.
Crédit photo : Cave La Tulipe
Et pourquoi ne pas mentionner Le Broc ? Cet apéritif artisanal reçoit de jeunes pousses des petits pruniers sauvages, que Laurent Fermis, le producteur, laisse macérer plusieurs jours dans du vin rouge, blanc ou rosé, en y ajoutant du sucre et du miel.
« Le rouge a un petit goût de cerise et d’amandes, le blanc celui de l’amande douce, et dans le rosé sont rajoutées des pointes d’agrumes bio, orange, pamplemousse et citron » indique Laurent au Républicain de Sud Gironde (23/05/2015).
La production annuelle reste somme toute assez modeste, aux alentours du millier de bouteilles. Les amateurs d’apéritif en quête de nouveauté peuvent passer commande directement à la propriété (06 80 08 16 62).
Mais l’apéritif, c’est aussi la simplicité, comme l’illustre fort bien le kir médocain. Le petit secret ? Remplacer le vin blanc par un bon rosé, et même un rouge, tout en conservant bien sûr le fond de crème de cassis (et même la crème de mûre pour le rouge). Goûtu.
Dans le foisonnement des vins blancs de Bordeaux
Sec, liquoreux, mousseux… C’est un choix pléthorique et parfois difficile qui se dessine pour celle ou celui qui souhaite précéder son repas d’un bon verre de vin blanc.
Le Bordeaux sec, essentiellement à base de Sauvignon et de Sémillon, est le plus répandu en Gironde, à travers un vignoble de 6 500 ha. Servi frais, il offre, en plus de sa belle acidité, des notes aromatiques boisées ou de fruits, toujours agréables en bouche. Le cépage Muscadelle, plus rare, apporte pour sa part des arômes sauvages et musqués, qui conviennent tout à fait à l’apéritif.
Les fans de la chose sucrée se tourneront plutôt vers les blancs moelleux ou liquoreux, parmi lesquels se détache presque immédiatement le Sauternes. Parfait compagnon du foie gras, complice du fromage bleu, ami des desserts, il s’invite aussi à l’apéritif, à condition de ne pas le servir avec du saucisson ou des cacahouètes. On préférera des pruneaux au lard ou des tranches de pain brioché au chèvre.
Mais la région située entre Cadillac et Langon, que vient découper la Garonne, offre d’autres opportunités de vins blancs liquoreux. Ainsi, l’AOC Barsac profite du microclimat qui contribue au développement de la pourriture noble, cette dernière permettant de concentrer le sucre dans le raisin. Il en ressort un vin de grande qualité, que l’on dit racé et onctueux.
C’est aussi le domaine du Loupiac, dont les vignobles se trouvent sur la rive droite de la Garonne, face à ceux de Barsac. La vendange reste manuelle afin de ne récolter que les raisins gorgés de sucre. Au final, le vin se révèle élégant, bien équilibré, onctueux sans pour autant sacrifier son profil aérien.
By Madrapour – Own work, CC BY-SA 3.0
On produit également des mousseux dans le Bordelais, commercialisés sous l’AOC crémant de Bordeaux depuis 1990, selon diverses déclinaisons : brut, demi-sec ou doux, en fonction de la teneur en sucre rajouté.
Sa qualité dépend en partie des galeries creusées dans les coteaux à toute proximité de la Garonne, garantissant une humidité importante et une amplitude thermique faible, indispensables à la prise de mousse.
Le royaume des brasseries locales
La Gironde n’est pas seulement une terre de vin, c’est aussi, et de plus en plus, celle de la bière. Pas moins de 53 brasseries artisanales (elles étaient 32 en 2018) occupent aujourd’hui le marché départemental.
Cette profusion représente autant d’opportunités pour les consommateurs, à même de puiser parmi une très riche variété de bières.
Crédit photo : Brasserie La Canaulaise
Ainsi, La Canaulaise propose une gamme limitée de bières, signe de qualité et de vocation artisanale. Toutes les bières, de fermentation haute, restent trois semaines en cuve et autant de temps en bouteille. Aucune opération de filtrage ou de pasteurisation n’intervient, dans le respect du goût authentique.
La blonde développe une saveur qui tend vers le biscuit et le caramel alors que la blanche revendique sa légère acidité et son goût d’agrumes orangés, parfaite après une session de surf juste à côté.
La brasserie Gasconha, fondée en 2010, peut déjà revendiquer une certaine ancienneté. Localisée à Pessac, elle regroupe aujourd’hui quatre salariés et affiche une production annuelle de 2000 hectolitres. Son ambition est avant tout « de changer les goûts des consommateurs, habitués aux grands groupes et à de la bière de basse qualité ».
Pour cela, la brasserie privilégie le brassage traditionnel des « real ales » britanniques, loin des objectifs de rendements élevés. Les bières ne reçoivent aucun additif ni conservateur, et ne sont pas non plus filtrées ou pasteurisées.
Deux gammes, la Gasconha et l’Alouette, sont proposées par la brasserie. À titre d’illustration, la Gasconha Seigle se révèle surprenante avec sa robe noire profonde, sa texture lourde et ses arômes de café nés de la torréfaction des malts. L’étonnement entraîne parfois la gourmandise.
S’amuser et se régaler sans alcool
Fondée en 1879, la Maison Meneau peut se targuer d’être une véritable institution en Gironde et même au-delà. À l’époque, l’entreprise familiale fabriquait des eaux-de-vie, dont des liqueurs, avant de dédier entièrement sa production aux sirops, jus de fruits et même smoothies.
La Maison Meneau a fait le choix du bio et du commerce équitable pour l’ensemble de ses produits. Si les frères Lassalle Saint-Jean concoctent en permanence de nouvelles recettes, les classiques continuent d’être plébiscités par les consommateurs. « On n’a jamais voulu toucher à la recette de grenadine de notre père » admet ainsi Philipe Lassalle Saint-Jean à Elsa Provenzano, du journal 20 minutes (07/04/2019).
Dans la catégorie des sirops, le choix se veut aussi riche qu’original : noisette, caramel, agave, citron vert, vanille, cola… L’entreprise produit également des thés glacés (comme celui au citron-thym), des jus et des smoothies (açaï-myrtille). De quoi prendre l’apéritif tous les jours.
Presque un siècle et demi d’histoire – Crédit photo: Maison Meneau
Si l’on souhaite une boisson 100% girondine, il convient de mélanger son sirop Meneau avec de l’eau minérale Abatilles, elle aussi jouissant d’une belle réputation. Avant d’être puisée au cœur du Bassin d’Arcachon, l’eau naturelle a parcouru un long chemin depuis le Massif Central, lui permettant de se charger de minéraux (roche, sable, argile).
La renommée des vignobles bordelais sert aussi la production de jus de raisin. Le producteur Didier Goubet, situé dans la Drôme, accorde une grande importance à la qualité de son jus, conçu sur la base du même cépage que celui des vins blancs de Bordeaux, le Sémillon. Obtenu par pressurage direct de la vendange, sans additif ni sucres ajoutés, son jus de raisin bio cherche également à flatter le palais à travers des arômes de pêche blanche, de coing et de miel.
Pour sa part, le château Rioublanc produit un jus de raisin bio élaboré à partir de Merlot. La boisson existe en version tranquille ou pétillante, cette dernière promettant une belle rondeur en bouche et une vraie fraîcheur grâce à l’effervescence. Comme l’indique la fiche technique du produit, « la magie de la pasteurisation est de conserver ce caractère bourru, caractéristique des vendanges. »
Le choix d’amuse-gueules bien, bien riches
En Gironde, l’on peut sans problème piocher parmi les spécialités charcutières pour composer son apéritif. Ainsi, pourquoi ne pas se tourner vers un joli morceau de grenier médocain, le découper en dominos, servis ensuite piqués d’un cure-dent ? Pour rappel, la recette du grenier médocain traditionnel n’accepte qu’un ingrédient principal, l’estomac de porc. Après avoir été dégraissé et lavé, il est assaisonné de sel, poivre et ail haché puis roulé sur lui-même et enfin plongé dans un court-bouillon de légumes pendant 3 heures.
Dans la même catégorie calorique, le célèbre grattons bordelais, servi sur de petites tranches de pain, peut tout à fait s’inviter à l’apéritif. Inventé par une charcutière lormontaise à la fin du 19e siècle, le produit fait appel aux meilleures pièces de jambon, d’épaule et de longue pour la partie maigre ; le gras étant pour sa part composé de couenne et de barde. On dit que la réputation du produit fut rapide et franche à sa sortie, poussant les Bordelais à traverser la Garonne pour venir se régaler le dimanche dans les guinguettes de Lormont.
Pure spécialité de Bordeaux, le cannelé se décline aussi en version salée. Audrey, productrice, propose toute une gamme de mini-cannelés (tous sans gluten) qui feront sensation auprès des convives. Différentes déclinaisons sont aujourd’hui vendues : chèvre-miel, curry, comté-chorizo, olives-pesto…
Un peu d’audace et d’originalité dans notre grignotage – Crédit photo : Crackers Résurrection
Enfin, impossible de conclure ce rapide passage en revue des produits locaux sans citer les crackers Résurrection, fabriqués selon une démarche écoresponsable. L’origine de la recette remonte à la découverte des drêches, ces céréales d’orge maltée ayant servi à la fabrication de la bière. Sorties de la cuve du brasseur, elles sont recyclées et mélangées à d’autres ingrédients nobles afin de donner naissance à de délicieux crackers, originaux à souhait : « châtaigne, carvi & curcuma », « duo de lin & piment d’Espelette » ou encore « figue & noix du Périgord ».
French Paradox : la cuisine du Sud-Ouest alliée de notre santé
Comment expliquer les faibles taux statistiques d’infarctus en Méditerranée et dans le Sud-Ouest en comparaison aux autres régions et pays industrialisés ? La réponse vient peut-être de nos assiettes.
Dr A.B., nutritionniste 20 octobre 2020 – Dernière MAJ : le 20 octobre 2020 à 17 h 11 min
La salade périgourdine: agréable à l’œil, succulente en bouche et bonne pour notre santé – Crédit photo: Arnaud 25 — Travail personnel – CC0
Une constatation étonnante
Le concept de French Paradox est né au début des années 80 lorsque statisticiens et cardiologues se sont intéressés tout particulièrement aux données concernant des maladies des artères coronaires comme l’infarctus du myocarde.
Ils ont constaté que les Français, et plus particulièrement les habitants des régions du sud-ouest de la France*, alors qu’ils ont une ration calorique plus riche, affichaient des taux de cholestérol sanguin équivalents à ceux des autres pays industrialisés, sans avoir une alimentation particulièrement pauvre en graisses animales. Mais force est de constater qu’ils consomment davantage de gras végétal, de fruits et légumes… et de vin.
Les victimes françaises d’infarctus étaient bien moins nombreuses que celles d’autres pays. D’où l’idée d’un paradoxe français et de multiples hypothèses pour expliquer ce phénomène. Aujourd’hui, le French Paradox continue de faire l’objet de nombreuses communications dans les congrès internationaux.
Il intrigue tout particulièrement les cardiologues anglo-saxons, qui ne cessent de se demander pourquoi le taux de mortalité par infarctus du myocarde est inférieur de moitié en France à celui que l’on observe aux États-Unis. Sans parler de la Grande-Bretagne, où la différence est tout aussi frappante.
Mythe ou réalité
Toutefois, ce paradoxe bien de chez nous voit son existence menacée. Sa réalité est en effet remise en question par de nombreux scientifiques et en particulier par les experts du Haut Conseil de la Santé Publique.
Dans leur rapport consacré à la politique nutritionnelle, ces spécialistes soulignent qu’il ne faut plus uniquement raisonner en termes de mortalité, mais aussi en termes de fréquence. Or, l’étude internationale MONICA réalisée par l’Organisation Mondiale de la Santé dans les années 90 sur les affections cardio-vasculaires a bien montré que « la fréquence de la maladie coronaire en France n’est pas exceptionnelle, mais du même ordre que dans les pays du Sud, de même latitude.
Par voie de conséquence, la notion d’un paradoxe spécifique français ne leur semble plus devoir « être retenue ». Il demeure que les Français sont bien moins affectés par les maladies cardiaques et notamment l’infarctus du myocarde que ceux du Nord de l’Europe ou de pays anglo-saxons.
Comment alors l’expliquer ? Vraisemblablement par le fait que l’alimentation contient moins de graisses animales, mais davantage d’huiles végétales, moins nocives pour le cœur. Sur le fait aussi qu’elle comporte des fruits et des légumes en abondance, suffisamment de céréales…
Le soutien (contesté) de Bacchus
Mais, qui dit culture française, dit aussi culture du vin. Cette boisson des dieux est-elle responsable du relativement faible nombre d’infarctus déplorés dans notre pays ? Certes, on sait que la mortalité globale est plus faible chez les personnes buvant quelques verres de vin par jour que chez celles qui demeurent totalement abstinentes et un effet protecteur vis-à-vis de l’infarctus du myocarde a été observé chez les premières.
Néanmoins, l’interprétation de ces résultats est parfois délicate, car certaines études trouvent également une action protectrice de la bière ou d’autres boissons alcoolisées et d’autres non. L’effet protecteur du vin oscillerait entre 1 à 2 verres par jour pour la plupart des études et atteindrait même 3 à 5 verres par jour selon une étude danoise publiée en 1995.
Après tout, ne dit-on pas « A votre santé » – Crédit photo: Andre Wislez – Flickr
Le principe actif n’est pas formellement identifié non plus. Certaines substances contenues dans le vin rouge comme les composés phénoliques pourraient diminuer l’agrégation des plaquettes sanguines, contribuant par-là éventuellement à diminuer le risque de caillot dans les artères et donc la survenue de maladies cardiaques comme l’infarctus.
Néanmoins, depuis la publication de différentes recherches dans la revue The Lancet en 2018, bon nombre de scientifiques réfutent les aspects bénéfiques du vin sur la santé, même à doses très faibles.
Le débat reste ouvert.
Une hygiène de vie simple
Le véritable French Paradox, s’il en est, réside dans l’ensemble des habitudes de vie, dont l’alimentation (équilibrée), qui peut ou non protéger contre les maladies cardiovasculaires. Aussi, le vin que l’on boit à table doit demeurer dans la liste des petits plaisirs que l’on aime s’offrir de temps en temps et ça, c’est loin d’être un paradoxe !
* Les Toulousains ont une mortalité coronarienne inférieure de 30% à celle des régions du Nord et de l’Est.
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